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Autisme

Par Laure BEZZETTO  (mai 2023)

L’autisme est un trouble neuro-développemental dû à une construction plus ou moins précoce du système neurologique qui se manifeste plus ou moins tôt dans la vie des personnes. Il peut à la fois être un facteur de  ralentissement et provoquer des troubles du langage, de la communication, compréhension, adaptation au changement. Il peut également devenir un élément de stimulation des compétences intellectuelles spécifiques pour un domaine qui passionne les personnes diagnostiquées. Longtemps considérées comme “folles”, les personnes atteintes d’autisme étaient autrefois internées. La France, en retard sur ses voisins en matière d’intégration et de prise en charge des personnes autistes, met en place en 2005 son premier plan autisme. Les acteurs publics s'intéressent de plus en plus à la question de l’inclusion et de l’intégration des personnes atteintes de TSA (Trouble du Spectre de l’Autisme) dans la société. En France, seul 1% de la population est autiste. Certaines grandes personnalités publiques de renommée internationale sont atteintes d’autisme tel que, Susan Boyle connue par l’émission britannique Britain’s Got Talent en 2009 qui a avoué être autiste Asperger ; mais aussi Bill Gates, ou encore Dan Aykroyd, protagoniste du film à succès SOS Fantôme. L’autiste est donc une personne qui perçoit et qui est perçue dans et depuis la singularité, ce qui la rend un personnage idoine au cinéma puisqu’il va permettre d’interroger le regard et le rapport à l’altérité.

Le cinéma nous informe sur bien des faits de société, et devrait éveiller la réflexion sur notre rapport à la réalité. Il s’avère pourtant que le cinéma tend à creuser le fossé de cette marginalité dans laquelle se trouve l’autiste, en stigmatisant, voire en caricaturant, les autistes qui apparaissent dans le spectre de la « déficience mentale » ou du « génie » avec peu de représentations entre ces deux extrêmes des TSA.

Le cinéma : de la réalité à la fiction autour du «personnage autiste »

On peut distinguer deux types de représentations cinématographiques du personnage autiste. Les représentations fictives qui renvoient à la création d’histoires de personnages sur la base de connaissances minimes, voire caricaturales, de ce qu’est l’autisme. Ils transmettent ainsi une représentation idéaliste ou non du TSA. Puis, les représentations documentaires, qui elles sensibilisent davantage à ce qu’est l’autisme. Ces dernières années, certaines représentations de fictions vont évoluer vers des représentations plus sensibles, comme le montre la série coréenne inspirée d’une histoire vraie, Extraordinary Attorney Choo (2022) inspiré du livre The Partner Trach d'Helen Wan, dans un drama de 10 épisodes qui documentent la vie d’une avocate autiste.

Un des films précurseur en matière de représentation du TSA est Rain man (1988) réalisé par Barry Levinson. Il fait partie de ces films qui catégorisent les autistes en deux spectres : les « déficients mentaux » et les « génies » dans le portrait de Charlie Babbitt qui vient de perdre son père. Mais à la mort de ce dernier, il comprend que l’héritage qui devait lui être attribué revient à son frère, dont il ne connaissait pas l’existence, car il est placé dans un centre psychiatrique.  

En 1993, Gilbert Grape (Lasse Hallström), sort au cinéma avec en tête d’affiche Johnny Depp dans le rôle de Gilbert, et Léonardo Dicaprio dans celui d'Arnie, un enfant atteint de troubles mentaux. Ce film montre du point de vue de Gilbert, le frère d'Arnie, comment la famille gère un enfant atteint du TSA. 

En 2012, Sophie Révil réalise un docu-fiction sur l’autisme dans Le cerveau d’Hugo. Révil s’inspire de témoignages pour réaliser 50% du film, et les 50% restants relèvent d’une fiction. Révil a rencontré des autistes adultes, des enfants, des adolescents et des parents pour tracer le parcours de son personnage afin de retracer au mieux le quotidien de ces familles dans le personnage de Hugo, qu’on voit grandir et évoluer.  

À l’occasion de la journée mondiale de la sensibilisation à l’autisme le 2 avril, trois femmes, Amel, Sofia et Hélène, analysent et témoignent de la différence entre ce qui est produit et montré sur le quotidien qu’elles vivent sous les narrations cinématographiques des séries représentant l’autisme. Amel est maman de trois enfants atteints de TSA et évoque son quotidien chargé. Chaque forme d’autisme est particulière, mais tous les troubles autistiques ne sont pas représentés dans les fictions. Par exemple, le trouble le plus grave, l’autisme de Kanner, aussi appelé autisme infantile, est sous-représenté dans le cinéma alors qu’il touche un bon nombre de ces enfants.

Amel, Sofia et Hélène se sont penchées sur deux séries en particulier : Atypical (2017) réalisé et produit par Netflix ainsi que Good Doctor (2018) mettent en avant deux jeunes hommes atteints de la forme la plus intelligente de l’autisme, celle d'Asperger. Les trois intervenantes regrettent le manque de réalité dans la représentation du quotidien de la gestion d’un enfant autiste (Atypical), où « on ne montre pas toute la difficulté des enfants autistes quand ils sont petits, ou très jeunes. Toutes ces lourdes difficultés qu’on subit en tant que famille » (Amel, mère de famille de trois enfants). L’une des femmes regrette aussi la catégorisation du trouble en deux catégories : « les gens pensent trop souvent qu’on est soit autiste à haut potentiel, et dans ce cas-là, c'est fascinant, soit un autiste sévère, non verbal, et on est mis dans la catégorie “handicap lourd” [...] Tous les autistes ne rentrent pas dans ces deux catégories, et on ne voit pas assez l’entre-deux » (Amel). Ces mères dénoncent aussi des productions spéculatives, à la recherche du profit, à des pics d’audience rendant les personnages attachants. Love on the Spectrum (2019) est une série documentaire qui s'immisce dans la vie quotidienne de jeunes autistes de tous spectres, à la recherche de l’amour. Amel, Sofia et Hélène sont plutôt séduites par ce documentaire. 

Ces femmes ont également apprécié un autre film produit et réalisé par Eric Toledano et Olivier Nakache : Hors norme (2019). Ce film raconte l’histoire de deux hommes qui dans leurs associations forment des jeunes issus des quartiers difficiles pour encadrer des adolescents autistes. Un film inspiré de faits réels, et qui pour Hélène, est « un film très précieux, car il touche aussi de façon interdépendante à notre société, et nos institutions qui ont fait du chemin. Il y a aussi des personnages qui représentent un spectre assez large ». 

 
L’autisme dans le cinéma de l’éducation : 

À l’international, Radio (2003) de Mike Tollin dépeint la figure d’un jeune afro-américain atteint de déficience mentale dans les années 1960. Inspiré d’une histoire vraie, le réalisateur montre comment un jeune homme ne sachant ni lire, ni écrire est intégré dans l’école du quartier. Entre moquerie et amitié, le film nous invite à suivre l’évolution et l’inclusion de ce jeune homme dans l’univers scolaire et devient ainsi une figure importante de ce combat. 

En  France, la représentation de la vie des personnes atteintes du TSA à l’école est faible : 1/3 des enfants autistes sont scolarisés 2 jours ou moins en maternelle (MEN-Depp), soit 30% de taux de scolarisation en 2018 ; en primaire, c'est 40% de taux de scolarisation dans une école en primaire. Il existe des documentaires comme la série documentaire Enfants autistes, bienvenue à l’école (Sophie Robert, 2017) qui, entre inclusion totale, partielle ou classes spécialisées, parle de l’inclusion des autistes à l’école et les moyens mis en place par l’Éducation nationale française pour réussir leur inclusion. 

Les chaussures de Louis (Jean-Géraud Blanc, Théo Jamin, Kayu Leung, Marion Philippe, 2020) est un court-métrage d’animation de 5 minutes réalisé par des étudiants à Paris en 2020 et qui est présenté dans une soixantaine de festivals internationaux. Il retrace l'arrivée d’un petit garçon, Louis, dans sa nouvelle école. Lors de sa présentation face à ses camarades, il explique sa vision du monde et son histoire. Ce court-métrage est sensibilisant, car il montre que face à la différence, c’est à nous de nous adapter et pas seulement à la personne « hors-norme » de s’intégrer. Ce petit documentaire reflète la volonté de l’Éducation nationale d’inclure les élèves différents dans le système scolaire, plutôt que de les intégrer. 

 

L’évolution des perceptions sur l’autisme a évolué au cours des décennies. Avec l’inclusion des élèves porteurs de différences, il devient important de réaliser ce que signifient ces altérités. Malgré le manque de proximité avec la réalité de ce que vivent les familles, le processus de sensibilisation à travers la fiction fait réagir. Les personnages sont attachants et cela montre que nonobstant la différence, on est tous des êtres humains avec des sentiments et un fonctionnement propre à soi.

 

férences bibliographiques et sitographiques

이상한 변호사 우영우 [Extraordinary Attorney Woo] (Yoo In-shik, 2003)

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Trailer de Radio (Mike Tollin, 2003)

Les chaussures de Louis (Marion Philippe, Ka Yu Leung, Jean-Géraud Blanc, Théo Jamin, 2020)

Filmographie : 

 

  • Blanc J-G, Jamin T, Leung K, Philippe M. (Réalisateurs). (2020). Les chaussures de Louis [Court métrage d’animation]. 

  • Hallström L. (Réalisateur). (1993), What’s Eating Gilbert Grape [Film]. Matalon Teper Ohlsson

  • Nakache O. et Toledano E. (Réalisateurs). (2019). Hors Normes [Film]. Gaumont. 

  • O’Clery C. (2019). Love on the Spectrum [Télé Réalité]. Netflix. 

  • Rachid R. (Réalisateur). (2017-2021). Atypical [Série]. Netflix. 

  • Révil S. (Réalisatrice). (2012). Le cerveau d’Hugo [Film documentaire]. Elzevir Films et Escazal Films, avec la participation de France Télévisions

  • Robert S. (2020). Enfants Autistes - Bienvenue à l’école ! [Film documentaire]. Ninsun Project. 

  • Shore D. (2017). Good Doctor [Série télévisée]. Sony Pictures Television et ABC Studios.

  • Tollin M. (Réalisateur). (2003). Radio [Film]. Columbia Pictures. 

Ressources didactiques pour comprendre ....             échanger et agir !

L'autisme au cinéma

Enfants autistes : Le chemin vers l'inclusion (Sophie Robert, 2017)

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